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Est justifié le licenciement pour faute grave fondé sur l’envoi d’un e-mail à un collègue dont le contenu porte préjudice à l’entreprise

Selon un Arrêt de cassation de la Chambre sociale de la Cour de cassation rendu le 02/02/2011, un e-mail adressé à titre personnel à un collègue de travail peut être utilisé par l’employeur dans le cadre d’une procédure disciplinaire, dès lors que son contenu est en rapport avec l’activité professionnelle. La Cour de cassation a considéré que le courrier électronique litigieux n’avait pas à bénéficier de la protection offerte par le droit du travail à la correspondance privée échangée sur le lieu de travail.

Plan :

1.    Analyse de la décision de jurisprudence

2.    Arrêt de la Cour de cassation, Chambre sociale, rendu le 02/02/2011, cassation (09-72449)

Analyse de la décision de jurisprudence

Par un arrêt rendu le 2 février 2011, la chambre sociale de la Cour de cassation a jugé que dès lors qu’un courriel consulté par l’employeur pour des raisons légitimes – l’e-mail n’étant pas identifié par son auteur comme « personnel » – est en rapport avec l’activité professionnelle du salarié, il ne revêt pas un caractère privé. L’employeur peut donc s’en servir dans le cadre d’une procédure disciplinaire.

En l’espèce, un salarié ayant des responsabilités dans l’entreprise a été licencié pour faute grave, aux motifs de divers manquements professionnels et de son comportement agressif et irrespectueux à l’égard de son supérieur hiérarchique et de l’échange à ce sujet de courriels provocateurs avec une autre salariée de l’entreprise, également licenciée à cette occasion.
L’employeur lui reprochait d’avoir tenu avec une collègue des propos destinés à nuire à l’entreprise et de s’être livré à des manipulations provocatrices à l’égard de la hiérarchie.

La justice ayant été saisie du dossier, toute la question était de savoir si l’employeur avait le droit d’utiliser le contenu de l’e-mail litigieux à l’appui d’une procédure de licenciement, le salarié estimant qu’il y avait eu violation des secrets d’une correspondance privée.

Pour le juge du fond, le licenciement était sans cause réelle et sérieuse. Pour condamner l’employeur au paiement d’indemnités de rupture et de dommages-intérêts pour atteinte à la vie privée, l’arrêt énonce que si le contenu du courriel envoyé ainsi que sa réponse apparaissaient en relation avec l’entourage du salarié, ces échanges ne revêtaient pas un caractère professionnel, s’agissant d’une conversation totalement privée dont la liberté de ton et les outrances éventuelles relevaient uniquement de la vie personnelle et intime à laquelle le salarié a droit même sur son lieu de travail, les propos tenus, destinés à rester entre les deux interlocuteurs et non pas à être diffusés, ne pouvant avoir pour effet de nuire à l’entreprise et ne pouvant être admis comme preuve d’un grief.

La Cour de cassation ne partage pas cet avis. Dès lors que le juge du fond a relevé que « le courriel litigieux était en rapport avec l’activité professionnelle du salarié, ce dont il ressortait qu’il ne revêtait pas un caractère privé et pouvait être retenu au soutien d’une procédure disciplinaire« , alors le licenciement pour faute grave fondé sur le contenu de cet e-mail était justifié.

Arrêt de la Cour de cassation, Chambre sociale, rendu le 02/02/2011, cassation (09-72449)

Sur le moyen unique :

Vu l’article 9 du Code civil et le principe du secret des correspondances privées ;

Attendu, selon l’arrêt attaqué, que M. X…, qui avait été engagé le 14 mars 2005 par la société Securitas France en qualité de chef de poste sécurité incendie puis promu le 1er mars 2006 chef de site, a été licencié le 14 novembre 2006 pour faute grave, aux motifs de divers manquements professionnels et de son comportement agressif et irrespectueux à l’égard de son supérieur hiérarchique et de l’échange à ce sujet de courriels provocateurs avec une autre salariée de l’entreprise, également licenciée à cette occasion ; qu’il a saisi la juridiction prud’homale d’une demande de paiement de diverses indemnités au titre de son licenciement ;

Attendu que pour condamner l’employeur au paiement d’indemnités de rupture et de dommages-intérêts pour atteinte à la vie privée, l’arrêt énonce que si le contenu du courriel envoyé ainsi que sa réponse apparaissaient en relation avec l’entourage du salarié, ces échanges ne revêtaient pas un caractère professionnel, s’agissant d’une conversation totalement privée dont la liberté de ton et les outrances éventuelles relevaient uniquement de la vie personnelle et intime à laquelle le salarié a droit même sur son lieu de travail, les propos tenus, destinés à rester entre les deux interlocuteurs et non pas à être diffusés, ne pouvant avoir pour effet de nuire à l’entreprise et ne pouvant être admis comme preuve d’un grief ;

Qu’en statuant ainsi par des motifs inopérants, alors qu’elle avait relevé que le courriel litigieux était en rapport avec l’activité professionnelle du salarié, ce dont il ressortait qu’il ne revêtait pas un caractère privé et pouvait être retenu au soutien d’une procédure disciplinaire, la cour d’appel a violé le texte et le principe susvisés ;

Par ces motifs : Casse et annule, dans toutes ses dispositions, l’arrêt rendu le 20 octobre 2009, entre les parties, par la cour d’appel de Paris ;
Remet, en conséquence, la cause et les parties dans l’état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d’appel de Paris, autrement composée ;

M. Bailly, conseiller faisant fonction de Président

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